Dans un contexte de lutte contre le dérèglement climatique, la rénovation globale et performante de l’ensemble du parc bâti français est un objectif majeur. Les travaux de rénovation énergétique dans un bâtiment peuvent être multiples : isolation de la toiture, des murs, du plancher, remplacement des menuiseries, de la ventilation, des systèmes de chauffages… Il est nécessaire de prioriser les actions à mener en prenant en compte l’enveloppe du bâtiment, le budget disponible et les équipements déjà présents. Mais pour réaliser des travaux réellement performants, et investir à bon escient, il est primordial de penser la rénovation dans son ensemble, dès le départ !

Alors comment engager, par étapes, une rénovation performante ? Nous faisons le point sur les objectifs nationaux et les pratiques actuelles, suivi d’un exemple concret pour réussir votre projet.

 

Qu’est-ce qu’une rénovation performante « par étapes » ?

En collaboration avec Dorémi et Enertech, l’Ademe a publié en janvier 2021 un rapport sur le sujet.

Ils y définissent la rénovation performante par étapes comme « une rénovation performante à terme (horizon 2050), une fois l’ensemble des étapes de travaux réalisées. La complexité de l’exercice impose des conditions de réussite décrites dans cette étude (nombre d’étapes, traitement des interfaces et interactions…). Atteindre la performance en 1, 2 ou 3 étapes de travaux, exige toujours une approche globale de la rénovation (vision de la maison « à terme », quand elle sera performante) pour bien articuler les interfaces (jonctions entre deux actes de travaux) et les interactions (dimensionnement du chauffage, de la ventilation…), qu’elles soient traitées simultanément ou sur plusieurs années. »

 

Les enjeux nationaux

La Loi pour la transition énergétique et la croissance verte d’août 2015 a inscrit dans le Code de l’énergie un objectif ambitieux : la consommation moyenne du parc bâti français, doit être rénové aux normes BBC rénovation (bâtiment basse consommation) ou assimilées, à l’horizon 2050. La Stratégie nationale bas carbone confirme l’ambition du rythme de rénovation, en visant d’ici 2020, 370 000 « rénovations thermiques radicales » de logements et 700 000 par an à partir de 2030.

Atteindre cet objectif de rénovation performante au niveau BBC rénovation ou équivalent est donc au cœur des politiques de transition énergétique, et de la lutte contre la précarité énergétique. C’est également un enjeu majeur pour le développement économique, industriel et la création d’emplois pour les trente prochaines années.

Ces extraits de l’étude précitée plantent le décor ! Oui mais…

 

Le constat actuel

Actuellement, on observe beaucoup de rénovations partielles qui consistent à juxtaposer des actes de travaux. Elles ne permettent pas d’atteindre les objectifs précités et peuvent conduire à créer ou renforcer des désordres sur le bâti, avec impact possible sur le confort, voire la santé des habitants.

Rénover un logement à un niveau BBC est complexe. Cela demande un investissement technique et financier conséquent ainsi qu’une sacrée dose de motivation ! Les ambitions au niveau national et européen ont souvent du mal à se concrétiser sur le terrain. L’enquête TREMI portant sur les 5 millions de rénovation effectuées entre 2014 et 2016 en France met en lumière ce constat.

Extraits de l’étude ADEME TREMI 2014-2016 « Saut de classes DPE énergie pour les travaux engagés par les ménages. Travaux privilégiés par les ménages. »

 

Cas concret

Vous souhaitez réaliser des économies d’énergie en isolant votre logement et vous décidez d’isoler en priorité vos combles. C’est une bonne idée car la majorité des déperditions de chaleur se font par la toiture (jusqu’à 30 %). Quelques mois ou années plus tard, vous décidez de poursuivre l’effort en isolant votre logement par l’extérieur.

 

Étape 1 : isolation des combles

Lors d’une isolation des combles, on arrête couramment l’isolant lorsque l’épaisseur applicable est inférieure à 10 cm. On positionne généralement un déflecteur en bout de toiture, où s’arrêtera l’isolant, afin de ne pas créer d’obstacle à la ventilation des combles en partie basse et d’éviter les mouvements d’air dans l’isolant. Cette pratique, tout à fait courante, permet d’assurer la longévité de l’installation en limitant les risques de désordres provoqués par l’humidité.

Cependant, si l’on se concentre uniquement sur l’isolation des combles, il apparait un risque de discontinuité d’isolation entre toiture et murs.

 

Étape 2 : isolation des murs par l’extérieur

Si l’entreprise mandatée pour l’isolation des murs n’est pas informée de l’étape 1, elle va arrêter son isolant sous le débord de toiture, comme le montre l’illustration ci-dessus (isolants en jaune + résille).

Un pont thermique important apparait avec une déperdition de chaleur dans l’angle. Ce point froid dégrade la performance thermique globale du logement, augmente le risque de condensation et, in fine, peut endommager la structure du bâtiment.

 

Comment éviter le pont thermique ?

Si l’isolant des combles a été bloqué verticalement lors de la première étape : il faudra, lors de l’isolation par l’extérieur, accéder à la tête de mur par l’extérieur en découvrant le bas de la toiture pour faire la jonction entre les isolants. Les entreprises réalisant des isolations par l’extérieur n’étant généralement pas assurées pour travailler sur la toiture, cette nouvelle intervention engagera un surcoût.

Même si le problème de pont thermique a été identifié et indiqué au ménage après la deuxième étape, les travaux correctifs ne seront pas forcément réalisés car :

  • le surcoût sera rédhibitoire,
  • cette intervention particulière d’isolation complémentaire ne pourra profiter d’aucune aide financière,
  • il y aura un frein psychologique important à retoucher des travaux récents.

En conclusion, l’étape 1 « isolation des combles perdus » aurait dû pointer les risques et anticiper l’isolation future de la façade.

 

Condition de réussite d’une rénovation par étapes

Loin d’avoir été complet sur le sujet de la rénovation performante par étapes, nous conclurons sur les conditions de sa réussite basées sur les retours d’expérience et des calculs présentés dans l’étude :

  • Les 6 postes de travaux énergétiques doivent être traités (cf image ci-dessous),
  • Les différentes interfaces et interactions entre postes doivent être anticipées et traitées, simultanément ou non,
  • L’installation d’un système de renouvellement d’air suffisant doit être prévue,
  • Le nombre d’étapes de travaux doit être limité à 3 au maximum, en regroupant 4 à 5 postes de travaux judicieusement choisis dans la première étape, dont la ventilation.

 

Sources et infos complémentaires :